Public vulnérable la nuit : le diagnostic dessiné des travailleurs et travailleuses du sexe ou personnes en situation de prostitution

Nantes Nantes Métropole, le 18 février 2019

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Dans le cadre du plan d’action Ville la Nuit, la Mairie de Nantes s’est engagée à réaliser un diagnostic auprès des publics vulnérables la nuit. Ce diagnostic a permis un travail avec des travailleuses et travailleurs du sexe ou personnes en situation de prostitution et des personnes sans abri, dégageant des constats et des pistes d’actions concrètes. Retrouvez l’avis citoyen commun en cliquant ici.

Focus dessiné sur les temps de travail avec les travailleuses et travailleurs du sexe et personnes en situation de prostitution.

Les dessins ont été réalisés par Muriel Douru, illustratrice nantaise, lauréate du Prix OUT d’Or 2018 du dessin engagé. Ces dessins ont permis de dépasser la barrière de la langue et d’anonymiser les illustrations, et ainsi renforcer la confiance, faciliter l’échange.

Des rencontres pour identifier les difficultés et les besoins

Trois temps de rencontre ont été organisés dans les locaux de l’association Paloma, entre des représentants de la Direction Santé Publique et des travailleur.euse.s du sexe de rue ou personnes en situation de prostitution. L’association rencontre en moyenne 350 personnes par an. La loi française n’interdit pas la prostitution.

Les travailleur.euse.s du sexe ou personnes en situation de prostitution exercent donc dans les rues de Nantes. La grande majorité sont migrantes et en situation irrégulière, d’où l’importance du dialogue par image afin de faciliter les échanges. Elles représentent une population silencieuse car elles sont rarement interrogées par les pouvoirs publics. La Ville leur a donné la parole pour qu’elles puissent s’exprimer sur leurs difficultés et leurs besoins. Synthèse de ces rencontres.

Les travailleur.euse.s du sexe ou personnes en situation de prostitution vivent dans une grande précarité

Elles exercent leur activité dans un objectif de survie. Leurs revenus sont insuffisants pour subvenir à leurs besoins fondamentaux : se nourrir, se loger (absence de bail), se vêtir… Seules, avec de faibles ressources, ne parlant souvent pas français, stigmatisées, elles souffrent d’un grand isolement social. De plus, elles sont éloignées de tous les lieux ressources où elles pourraient prendre connaissance de l’offre sociale pour les personnes en grande précarité.

L’insertion sociale est très compliquée

Bien souvent migrantes et sans papiers, de nombreux obstacles compliquent fortement l’arrêt de l’activité pour celles qui souhaitent sortir de la prostitution.

 

Il est aussi difficile pour elles d’effectuer leurs démarches administratives : documents en français qu’elles ne comprennent pas, prise de rendez-vous compliquée, rythme de vie en décalage avec les horaires des administrations. Certaines difficultés peuvent être levées grâce à un accompagnement adapté mais les institutions n’en proposent pas.

Certaines associations les accompagnent dans leurs démarches mais elles ne sont pas dimensionnées pour couvrir les besoins. Les membres sont décrits comme des soutiens bienveillants et ils représentent un lien entre les travailleur.euse.s du sexe ou personnes en situation de prostitution et la société civile.

Les travailleur.euse.s du sexe ou personnes en situation de prostitution vivent dans une grande violence

Toutes les femmes rencontrées ont témoigné de la violence qu’elles subissent : injures verbales, actes physiques, agressivité gratuite et humiliante…

 

Elles sont extrêmement exposées à la violence de rue du fait du jugement moral qui pèse sur elles et de leur visibilité dans l’espace public, la nuit.

Les clients violents sont nombreux. Les viols, même si elles emploient rarement ce terme, semblent fréquents. Victimes ou témoins d’une agression, elles sont bien souvent démunies face à la violence. Elles ne font pas systématiquement appel à la Police. Beaucoup l’identifient plus comme un contrôleur de papiers que comme une ressource protectrice.

La nuit, il y a tout de même des formes de solidarité

Il y a d’abord de la solidarité entre pairs : les travailleur.euse.s du sexe ou personnes en situation de prostitution communiquent entre elles pendant leurs heures de travail pour se protéger, à la fois verbalement avec celles qui se trouvent à proximité, et par téléphone avec leurs amies.

Les riverains et les commerçants peuvent, eux aussi, faire preuve de solidarité, parfois en leur offrant à boire et à manger, mais surtout, en appelant la Police s’ils sont témoins d’une agression.

La plupart attendent avec impatience le passage du Funembus de Paloma, qui fait trois tournées de nuit par semaine. Il leur apporte un temps de repos et de convivialité dans un environnement rassurant, ce qui représente pour elles une grande source de soutien.

Préconisations

Pendant ces temps de rencontre, les travailleurs et travailleuses du sexe ou personnes en situation de prostitution ont pu exprimer certains souhaits. En voici quelques uns :

  • un changement de regard, plus de bienveillance et moins de stigmatisation de la part des citoyens et des institutions. Même si elles sont conscientes que les habitants puissent être dérangés par leur présence, elles souhaiteraient pouvoir cohabiter dans un respect mutuel.
  • Des temps de médiation plus réguliers avec les riverains.
  • Plus de toilettes et de points d’eau accessibles la nuit.
  • Un accompagnement pour une sortie de la prostitution.
  • Un soutien des associations qui les aident et les accompagnent dans leurs démarches administratives.